La vie et la triste fin de Michèle Morgan
Tas d'beaux yeux, tu sais... On se souvient tous de la phrase, prononcée avec tant de tendresse par Jean Gabin dans Le Quai des brumes de Marcel Cameé, et à quel point c'est approprié car, plus que tout chez elle, ce sont les yeux de Michéle Morgan - cool, sensuel, mystérieux, divin - qui dominent nos souvenirs de l'actrice.
De la fin des années 30 jusqu'au milieu des années 50, elle était l'une des stars de cinéma françaises les plus en vue, aimée des critiques, adorée du public, et sa présence séduisante et éthérée - nous a été révélée pour la première fois dans un béret et un imperméable brillant conçus pour elle de Coco Chanel dans le film de Carné - valorise bien des grands films de cette période.
Comme Greta Garbo, l'actrice à laquelle elle est souvent comparée, Morgan a quitté l'écran avant que l'âge ne commence à apparaître sur ses traits, elle reste donc à jamais jeune et vitale dans nos mémoires - l'une des sirènes les plus puissantes du grand écran.
Le nom original de l'actrice était Simone Renée Roussel. Elle est née le 29 février 1920 à Neuilly-sur-Seine, Hauts-de-Seine, France, l'aînée de quatre enfants. Son père, Louis Roussel, était gérant d'une entreprise d'exportation de parfums.
Lorsqu'il perdit son emploi lors de la crise économique de 1929, Roussel et sa famille s'installèrent à Dieppe, dans le nord de la France, où il dirigea sans succès une épicerie. C'est en grandissant à Dieppe que Simone réalise que son avenir est dans le show business. Elle avait 14 ans lorsqu'elle s'enfuit à Paris avec son jeune frère Paul pour se faire un nom en tant qu'actrice.
Avec la bénédiction de ses parents, Simone a été autorisée à rester avec ses grands-parents à Neuilly alors qu'elle poursuivait son rêve. C'est après avoir tapé dans l'œil de Jean Devalde qu'elle décroche son premier rôle au cinéma, un figurant dans Mademoiselle Mozart d'Yvan Noé, une comédie avec Danielle Darrieux. Impressionnée par son enthousiasme, Noé conseille à la jeune comédienne en herbe de prendre des cours de théâtre et l'année suivante, elle s'inscrit à un cours d'art dramatique dirigé par René Simon.
Après avoir joué des petits rôles dans cinq autres films, Simone Roussel a eu sa chance lorsque Jane Witta, fille de la continuité, l'a remarquée et l'a recommandée à Mare Allégret pour le rôle principal féminin dans son film Gribouille. En vedette avec Raimu, l'une des plus grandes stars du cinéma français à l'époque, Simone a fait forte impression auprès de la critique et du public, bien qu'elle soit désormais connue sous son nom d'adoption : Michéle Morgan.
Ensuite, Allégret l'engage aux côtés de Charles Boyer dans Orage puis vient le rôle qui fait d'elle une star internationale : le rôle de Nelly dans Le Quai des brumes de Marcel Cameé, aux côtés de Jean Gabin. C'est dans ce film que Gabin livre la réplique immortelle « T'as d'beaux yeux, tu sais » qui colle à l'actrice et lui donne le titre de son autobiographie de 1977, Avec ces yeux-la.
Le jumelage inspiré de Morgan avec Gabin dans le film de Carné en a fait à la fois des stars majeures et les offres de travail d'Hollywood se sont rapidement dirigées dans leur direction. L'actrice résiste et part en Allemagne pour retravailler avec Gabin, sur un film inférieur pour UFA : Le Récif de corail de Maurice Gleize.
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